Barbie et la mort du rose
Barbie et la mort du rose
En début d’été, j’ai débuté le visionnement de la série documentaire ‘Trainwreck: Woodstock ’99’ sur Netflix et, pour être honnête, j’ai choisi de ne pas la terminer. Après le deuxième épisode, j’en avais assez. Ça m’a fait peur, fâchée et aussi déprimée.
J’ai trouvé qu’il y avait un parallèle à faire avec le monde dans lequel nous vivons, qui semble avoir par moment, lui aussi, un fort potentiel de dérapage. Gestion souvent questionnable des humains, du territoire et des ressources par la classe dirigeante, capitalisme et néolibéralisme à outrance, gens de plus en plus fatigués, donc anxieux, irrespectueux et désengagés. Des ingrédients pour créer un beau petit cocktail de société.
Cette vision du noir m’a donné envie de voir plus rose, la couleur de l’été, avec la sortie du film Barbie, que je dois vous dire, j’ai beaucoup apprécié. Je suis bien au fait que le scénario ait suscité des réactions opposées. Allez donc voir par vous-mêmes ce que le film éveille chez vous, et, pourquoi ne pas en discuter?
Je ne m’étendrai pas ici sur ma critique détaillée de ce succès cinématographie estival, je considère que je n’ai pas assez de connaissance en cinéma pour ça, mais je me permettrai de faire un lien entre Barbie, Woodstock 99 et l’état de notre monde actuel : ils mettent en lumière les conséquences néfastes du patriarcat. Pour tout le monde. Même Ken tsé.
Ce n’est pas rose, mais étrangement, ça met quand même une petite touche de couleur à ma lucidité.
Lors d’un 5 à 7 du mois d’août, je disais d’ailleurs à mon amie Jeanne que j’avais une drôle d’impression de voir plus clair. Sa sagesse m’a remise à ma place comme suit : «Tu vois plus clair qu’AVANT.»
Oui Jeanne. Tu as raison. Je n’ai sans doute pas fini d’être «émerveillée» par la clarté. Bien que cela implique le deuil de certaines conceptions, ça m’apparaît comme une nouvelle à célébrer, en plus d’être une bonne raison de chanter I Can See Clearly Now de Johnny Nash.
Ce qui m’amène à penser que je suis un peu dans le même processus que Barbie, dans le fond. De son côté, c’est de prendre conscience de l’existence de la mort qui enclenche une démarche vers la lucidité.
Anecdote de mort et de Barbie (oui oui) : cet été en camping, je suis allée coucher ma fille de 6 ans vers 22h. Elle était bien consciente que les adultes, eux, restaient sur le bord du feu à festoyer. Elle m’a alors dit sur un ton plutôt joyeux et assumé « Maman, les adultes, ils peuvent rester sur le bord du feu plus tard, parce que eux, ils sont plus vieux, alors ils savent qu’ils vont mourir plus vite. C’est pour ça qu’ils en profitent. »
Bien que la mort soit très loin dans la liste de mes sujets préférés à aborder avec ma fille de 6 ans, je vois dans ses propos quelque chose de rassurant : une certaine lucidité.
Jack Johnson dit dans sa chanson Symbol In My Driveway, écrite en 2003, (il n’était donc évidemment pas invité à Woodstock 99 et de toute façon, il est plus du genre chanson de bord de feu d’adultes qui veillent tard en camping) :
I've got a light bulb full of anger
And I can switch it on and off
Situations that can be so bright
I can't believe
How pathetic we can be
Je ne vous cacherai pas que la lucidité a aussi tendance à remplir mon bulbe de colère. Mais bon, ça me tente moins d’être Limp Bizkit et ce n’est pas trop mon style d’inciter à briser des affaires.
Je choisis donc de m’identifier à Barbie, en toute agentivité.
Et mon bulbe rempli de colère, quand je le switcherai à ON, je tenterai de l’utiliser pour éclairer les nombreuses nuances de rose de notre société.
PS : J’ai déjà écrit dans une précédente Minute papillon que je n’étais pas très bonne pour vendre Comme des filles Productions. C’est toujours vrai. Ceci dit, j’ai tout de même accepté l’invitation du Salvas à participer à leur podcast Regards féministes, et je trouve, somme toute, que j’ai réussi à bien y expliquer la vision #commedesfilles. Bon, ça prend 44 minutes par contre, et je ne suis pas habillée en rose, mais en noir. Vous voilà prêt à écouter en toute lucidité.